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Date de création : 21.11.2009
Dernière mise à jour : 24.07.2025
1588 articles


La vie avec un fil (bis).

Publié le 24/10/2010 à 21:27 par lamessebleue Tags : cyclone suivre accompagner brassens éducation
La vie avec un fil (bis).

 

Lola est branchée chaque jour vers les 19 heures 30. Ensuite il n’est pas question qu’elle reste assise dans sa chaise, sans remuer. Un enfant, ça bouge, c’est de la chair qui pousse, disent les anciens, qui ont souventes fois raison. Adoncques, puisque la petiote est chez moi, je me saisis du sac contenant la pompe portable et la poche de nutrition, je l’installe sur mon épaule droite, je saisis le fil, qui fait à peu près deux mètres de long, avec la main droite, je le tends mais pas trop, de telle façon qu’il ne traine pas à terre, qu’un malencontreux mouvement ne vienne pas écraser le rectangle bleu du système anti-bulles, et je suis comme je peux. J’accompagne la gamine, elle devant et moi derrière, comme le cheval dans le mauvais temps (coucou Brassens !) qui se met à batifoler dans la maison, à vitesse variable, quelquefois respectable, au hasard des couloirs, des pièces diverses, des toilettes, de la salle de bain, à la découverte de tout ce qui l’intéresse et qui contribue à son éducation. De temps en temps, il me faut crier, affolé : « Lola, ton fil ! » Lola stoppe, car elle sait qu’il ne faut pas tendre le précieux cordon, elle essaie de le dénouer, ce maudit fil qui lui fait des nœuds de marin autour des jambes. Suivons-la, si toutefois  le souffle ne nous manque pas.

Dans le bureau, elle allume et éteint la lampe à sel, quatre ou cinq fois, en poussant le petit interrupteur, puis elle se lasse et passe à autre chose. Au passage, elle caresse la citrouille en poste sur une tablette, cucurbitacée déjà en attente d’Halloween. Elle essaie de grimper sur le clic-clac, c’est difficile, il faut l’aider. Elle redescend aussitôt, c’est amusant, on recommence. En passant devant la bibliothèque, elle se saisit d’un livre, toujours le même,  pauvre Jean-Louis Curtis ! Elle arrache une miette de la couverture en papier et la présente à papy. Lola adore les livres, mais c’est pour les massacrer ! Pour l’instant ! Papy râle, il tient à ses bouquins. Ce sont les reliques de son jeune temps ! « Non Lola ! » Elle comprend et se dirige vers l’armoire de bureau, elle ouvre une porte, prend la carte topographique IGN n°2549, toujours la même, a-t-elle des envies d’évasion la petiote, referme la porte bruyamment, non sans avoir agité les clefs qui pendouillent à la serrure d’une espèce de coffre à l’intérieur. Papy ferme les yeux car il pense que la porte de l’armoire de son bureau va s’écrouler. Mais non, c’est vieux, mais c’est du solide. Ensuite Lola quitte le bureau, elle y reviendra tout à l’heure pour accomplir les mêmes gestes. La voilà devant la télé. Elle adore appuyer avec ses petits doigts sur les boutons qui s’alignent sur la façade de l’appareil. Soudain icelui se met en marche. Elle s’étonne de voir des images bruyantes, agitées, vivement colorées et son étonnement se traduit par un geste précis. Ses deux petits poings sont serrés sous les aisselles et elle écarte les coudes, geste appris qui signifie « ben ça alors ! ». Elle appuie derechef et change les chaines, la coquine, aucun programme ne la satisfait. Puis soudain, c’est la neige. Apparait un écran couvert de points blancs qui clignotent, comme si nous étions victimes d’une crise d’hypotension. C’est ce qu’elle voulait, j’en suis sûr, car elle regarde papy et profère d’étranges borborygmes qui semblent signifier : « alors papy, qu’est-ce que tu attends pour réparer ? ». Au-dessus de la télé, un calendrier perpétuel nous rappelle le temps qui passe. Lola le montre de l’index et le veut. Papy lui donne. Devrait-il ? Que celui qui n’a jamais obéi à son petiot lui jette la première pierre ! Elle en disperse les pièces sous la table et sous les fauteuils. A droite de la télé, des coupelles en plastique, bien empilées, attendent les verres de l’apéritif. Pardon, « attendaient », car les voilà, elles aussi sur le plancher des vaches, au hasard de leurs chutes provoquées. Heureusement les télécommandes et le téléphone portable sont à l’abri, hors de portée, c’est fragile, ces bestioles ! Ensuite Lola se dirige à toute vitesse dans la cuisine, et là, il y a également matière à faire. Les magnets sur le frigo, que l’on décolle et recolle dix fois, les portes des armoires, desquelles on évacue les Tupperware, la poubelle chromée qu’il ne faut surtout pas toucher, la machine à café Tassimo, qui utilise du café à 30 euros du kilo, mais ça, elle ne le sait pas, les interrupteurs, la manique, les dessus de chaise, qui sont normalement scratchés. Papy suit, avec le sac, toujours en veillant à ce que le fil ne se tende pas, en criant quelquefois, de moins en moins fort car il est essoufflé. C’est sa gym quotidienne, merci Lola, tu évites à papy le vilain infarctus ; même les vieux doivent faire du sport, ils l’ont dit à la télé ! La salle de bain. Bof, pas grand-chose à y faire. Enfin, avant le retour, allons voir la machine à pain qui fleure bon le soupirail du boulanger. Elle a des voyants, ça fait du bruit, ça tourne, c’est chaud, Lola est fascinée. Il faut la porter, comment refuser ses petits bras qui se tendent jusqu’au ciel ainsi que son regard implorant, et lui montrer la boule de pâte blanche qui tourne dans l’appareil. On dirait une grosse bête aux formes bizarres et changeantes, qui se débat dans un piège. A côté, la machine à laver le linge a droit aussi à quelques caresses, car elle tremble et ça fait une drôle de sensation sur les doigts. Papy repose l’enfant et c’est reparti dans l’autre sens. « Attention à ton fil Lola, recule-toi mamie, je passe ! »

20 heures. La pompe portable et portée bipe. Maman Cécile est là et déclampe la tuyauterie plastique, puis elle programme l’appareil. Ses gestes sont sûrs, ils connaissent la machine, depuis le temps ! C’est parti, la solution nutritive s’écoule doucement dans le corps de l’enfant. Lola mange et ça durera 13 heures. Mais comme il n’est pas encore l’heure d’aller au dodo, papy reprend le sac et entame de nouveau le circuit habituel, à genoux maintenant, car il est sur les rotules, puis bientôt à plat ventre, non, je blague. On trouve en soi les ressources nécessaires quand il s’agit d’aider une petite princesse.  A 21 heures, dodo. Ouf ! Lola dit toujours oui, ou plus exactement ouais, quand on lui parle, sauf quand elle entend « tu vas au dodo Lola ». A ce moment la tête de la petiote oscille de droite à gauche ou inversement. Cependant, elle se laisse mettre en tenue sans problème. Pyjama, turbulette, tutute, boite à musique, doudou. Lola est résignée, elle suce énergiquement, elle piaule, traits du visage en position de lune sereine, qui ne pleure ni ne rit (souvenirs d’école !).

Lola a dormi à la maison cette nuit, car les parents Cécile et Florent, se font une soirée cinéma, avec nos encouragements et notre bénédiction. Lola a bien dormi, sa machine n’a pas hurlé. Cependant elle s’est réveillée à 7 heures. Tiens, comme c’est bizarre, d’habitude c’est plutôt 9 heures ! On le prétend ! Ce qui nous laisse, à papy et mamie, de nouveau environ deux heures et demi à courir de par le monde, à la découverte des électroniques, des portes qu’on claque, des cubes qu’on empile, des gouttes d’eau que l’on essuie, sur le sol, tombées du biberon, des feuilles arrachées, de la télé qui braille, des interrupteurs à refermer, de la baballe à lancer, de la couche à changer, de la stomie à vider, de la tutute à laver. Heureusement, le sac est plus léger, la poche de nutrition s’étant vidée dans la nuit. A neuf heures pile, la pompe électronique bipe, c’est fini, Lola est repue. Cela fait treize heures qu’elle mange. On dit que les repas durent longtemps dans notre pays, là c’est un record. Maintenant il faut attendre maman qui viendra chercher sa petiote, l’emmènera pour la débrancher à la maison, selon le rituel de « la messe bleue ».

Quand Lola est partie, après que nous eûmes réparé les dégâts causés par le récent cyclone, papy et mamie, assis dans les fauteuils cuir bufflonne chocolat, se regardent et avouent en souriant:

«Maintenant on va s’ennuyer ! »